mercredi 9 juillet 2008

Mugabe, ce pelé, ce galeux d’où nous vient tout le mal…

Parlons clair n°46

Mugabe, ce pelé, ce galeux d’où nous vient tout le mal…
Les grands médias français, journaux de droite et de gauche, télés privées et publiques au service de Sarkozy, ont enfin trouvé un sujet qui fait leur unanimité : le Zimbabwe est un enfer africain, et Robert Mugabe, son président inamovible, un vieillard criminel responsable des maux qui affligent son peuple. Même le journal « L’Humanité », qui fut autrefois anti-impérialiste, et qui est en 2008 désireux de ne pas être différent des autres, a titré l’autre jour : « Mugabe, au ban de l’Afrique » ! Ce qui est à la fois un mensonge, comme le montre la récente réunion de l’OUA, et une falsification des propos de Mandela par exemple. Car le père de la nation arc-en-ciel, et Zuma, dirigeant élu de l’ANC, s’ils ont condamné l’obstination de Mugabe à s’accrocher à un pouvoir ébranlé, et déploré « l’échec tragique du Zimbabwe », ne l’ont jamais attribué à son seul président. Il serait donc temps d’informer l’opinion française, manipulée, de quelques vérités que l’on sait, d’Alger à Pretoria.1-Le Zimbabwe, autrefois Rhodésie, a subi très longtemps le pillage colonial par l’Empire britannique. Le peuple noir du Zimbabwe n’a réussi à arracher son indépendance qu’après de longues années de lutte armée, sous la direction de militants courageux et populaires comme Robert Mugabe et ses compagnons, les partisans de la ZANU. Ils en conservent encore le prestige, une génération plus tard.2-L’indépendance politique arrachée au Royaume Uni Britannique laissait au nouveau Zimbabwe un lourd passif, sous-développement industriel, chômage et extraordinaire inégalité agraire : les trois-quarts des terres les plus fertiles restaient entre les mains de quelques dizaines de milliers de familles de grands propriétaires d’origine européenne, qui y produisaient essentiellement du tabac destiné à l’exportation. Aux termes des accords d’indépendance, la redistribution des terres, aspiration populaire incluse dans le programme des mouvements nationalistes arrivant au pouvoir, devait se faire en quelques années, grâce à l’indemnisation des colons expropriés par la Grande Bretagne. Les autorités britanniques n’ayant jamais tenu leur promesse, la réforme agraire était toujours à faire une génération plus tard.3-Le régime élu du Président Mugabe, soutenu en cela par la population, a lancé il y a quelques années un début de réforme agraire, sans indemnisation des grands propriétaires expropriés. Malheureusement, cela s’est fait de façon chaotique, trop souvent au seul profit de clients politiques du pouvoir plutôt que des paysans nécessiteux. Parallèlement, l’asphyxie économique du pays par les Britanniques et l’occident (aucun crédit du FMI, embargo commercial) entraînait une inflation énorme et la ruine d’une agriculture d’exportation incapable de poursuivre les investissements nécessaires (engrais, machines, etc).4-Une réforme agraire, donc, entamée dans les pires conditions, qui n’étaient pas du seul fait de Mugabe et son entourage, se termine en désastre économique, et l’émigration massive vers l’Afrique du Sud, au point d’y provoquer de véritables pogroms xénophobes. Le mécontentement populaire s’est exprimé majoritairement lors des élections législatives de 2008. L’obstination de Mugabe s’accrochant au-delà du raisonnable au pouvoir, en truquant les élections présidentielles, en faisant régner la terreur grâce à des gros bras recrutés dans le « lumpen prolétariat » de Harare et des villages, n’est évidemment pas la solution adaptée à longue échéance. Mais il est malhonnête de présenter le parti d’opposition (MDC) et notamment son dirigeant Tsvangirai, ancien syndicaliste, comme des démocrates progressistes : le syndicalisme peut conduire au pouvoir, à condition d’en sortir et de donner des gages politiques à des sponsors qui n’ont rien de désintéressé. Le MDC dont le programme est flou, hormis sa volonté d’accéder au gouvernement, est soutenu et financé par les dirigeants occidentaux et les agrariens « blancs » du Zimbabwe, menacés de réforme agraire.5-Si les solutions apportées par Mugabe et son parti sont inadaptées, le problème de l’inégalité agraire est bien réel, et la réforme agraire toujours nécessaire. Mieux, le même problème hérité de la civilisation européenne, existe aussi dans les pays voisins, et surtout en Afrique du Sud. Faute de réforme agraire depuis la fin de l’apartheid, il reste explosif, se traduit par une criminalité très forte à la campagne, un chômage massif (+ de 25%) que l’industrie ne peut absorber, et peut déboucher sur le pire si l’ANC ne sait pas le résoudre.6-Pour l’instant, il s’agit d’éviter le pire en ne se joignant pas à la meute des médias occidentaux qui envisage froidement de faire du drame zimbabwéen le prétexte d’une intervention impérialiste en Afrique Australe, à l’image de ce qui se passe au Tchad, en Somalie, etc…Relayés par les « Européens », les dirigeants britanniques et Georges Bush exigent de la « communauté internationale » de ne plus reconnaître les autorités du Zimbabwe (alors qu’ils maintiennent au pouvoir « leurs » dictateurs africains, du Camerounais Biya au Tchadien Deby). Prêts à combattre pour « la démocratie » jusqu’au dernier Zimbabwéen, ils envisagent froidement la guerre civile à Harare, et une intervention militaire internationale pour y « rétablir la paix », ce qui serait une ingérence directe de l’impérialisme en Afrique Australe. Le Zimbabwe, dans ce schéma impérial, pourrait devenir un nouvel Irak. La seule issue politique est la négociation pacifique entre Zimbabwéens, sans ingérence extérieure.
Il serait ahurissant que des anti-impérialistes français, par ignorance ou par opportunisme, prêtent la main à cette opération de l’impérialisme mondial, Bush, Gordon Brown et Sarkozy réunis.
Francis Arzalier

mercredi 2 juillet 2008

Fiscalité :: Combien la réforme du ministre des Finances va vous coûter

Fiscalité :: Combien la réforme du ministre des Finances va vous coûter

30 juin 2008 11:42 Il y a 2 jour(s)
Thème Pauvreté/Riches, Belgique, Gouvernement, Campagne pouvoir d'achat, Belgique
Fiscalité ::
Combien la réforme du ministre des Finances va vous coûter
Le ministre des Finances prétend défendre notre pouvoir d’achat grâce à son projet de réforme fiscale. Mais il se permet contre-vérités, omissions, non-dits… Et cadenasse sa « rage taxatoire » : celle d’une TVA profondément injuste.
Marco Van Hees

«On paye trop vite trop d’impôts», affirme Didier Reynders pour justifier une nouvelle réforme fiscale. Pourtant sa réforme vise à rendre les riches plus riches. Qui alors paye trop vite, trop d’impôts ? (Photo Solidaire, Salim Hellalet)
1. Une réforme fiscale qui profite aux plus riches
« On paye trop vite trop d’impôts », affirme Didier Reynders pour justifier une nouvelle réforme fiscale. L’impôt des personnes physiques compte actuellement cinq tranches d’imposition (25, 30, 40, 45 et 50 %). Le ministre ne veut en garder que trois (25, 40 et 50 %). On cible ainsi les bas et moyens revenus, soutient-il.
Faux. Un bas ou moyen revenu ne bénéficierait que partiellement d’une telle mesure, alors que les plus riches s’en délecteraient pleinement, puisque leurs revenus couvrent l’ensemble des tranches visées.
Cette réalité est confirmée par l’évaluation budgétaire établie par… le cabinet Reynders. Sur les trois milliards d’euros que coûterait une telle réforme, un milliard irait aux 10 % les plus riches de la population (plus de 50 000 € brut par an).
Si l’on veut vraiment cibler les bas et moyens revenus, sans avantager les plus riches, cela peut se faire facilement en accordant un crédit d’impôt. Comme le propose la FGTB, par exemple : jusqu’à un certain salaire, vous recevez un chèque fiscal de 100 € par mois qui est directement déduit de votre précompte professionnel. Ou même, vous retouchez de l’impôt négatif, si vous êtes redevable de moins de 100 € d’impôts par mois.
2. La question que le ministre ne pose jamais
Osons une question indiscrète, voire déplacée : où le ministre va-t-il chercher les trois milliards de sa nouvelle réforme fiscale ? Il n’y a pas 36 solutions. Il y en a deux. Augmenter d’autres taxes (plus injustes) et/ou diminuer les dépenses de l’Etat. À quoi sert-il de payer 500 € d’impôts en moins si c’est pour payer 1 000 € en plus via la TVA, les frais scolaires, les soins médicaux, etc. ? Un seul exemple : si l’Etat ne subsidiait pas l’école, un couple ayant trois enfants devraient débourser 300 000 € rien que pour les études (du primaire au supérieur) des enfants.
3. La rage taxatoire, version Reynders
On sait que la baisse des impôts constitue le fonds commerce électoral de Didier Reynders. Mais pas de n’importe quel impôt. Ne venez surtout pas lui parler d’une baisse de la TVA. Or, il s’agit d’un impôt beaucoup plus injuste que l’impôt des personnes physiques, puisque chacun paye 21 %, qu’il soit petit pensionné ou grand patron de banque.
De 2002 à 2007, les recettes TVA sont passées de 19,6 à 25,5 milliards € . Une augmentation de six milliards (+ 30 %) en cinq ans. Deux fois la réforme fiscale de Reynders. S’il y a une véritable réforme fiscale à mener, c’est bien de réduire considérablement la part de cette taxe injuste.
Or, l’évolution est exactement inverse. Lors de l’introduction de la TVA, en 1971, le taux n’était que de 16 %. Depuis, il est passé successivement à 17 %, 19 %, 19,5 %, 20,5 % et 21 %. Par contre, le taux majoré sur les produits de luxe (25 %) a été complètement supprimé.
Et à l’avenir, les libéraux et la Commission européenne veulent continuer à augmenter les taxes indirectes : la TVA, les accises sur le carburant, les taxes sur l’eau et les déchets (au nom du « coût vérité »)…
4. L’homme qui parle à l’oreille des pauvres ?
Réduire la TVA ? Reynders y est farouchement opposé. Même sur des besoins de base comme le gaz et l’électricité. Est-il normal de payer le même taux pour du caviar que pour se chauffer ? Oui, soutient le ministre, car réduire la TVA sur l’énergie profiterait plus au riche qui chauffe sa piscine qu’à un pensionné à revenu modeste.
Pourtant, prenons la grosse villa que possède à La Hulpe son ami Michel Tilmant, le boss d’ING. La baisse de la TVA sur l’énergie ne lui rapportera à peine 0,04 % de son salaire de 4,4 millions €/an. Alors que pour un petit pensionné, cela représente facilement 2 % de son revenu.
Et puis, n’est-il pas étonnant de voir Reynders dénoncer une mesure qui profiterait aux riches ? N’est-ce pas grâce à sa réforme fiscale de 2001 que son ami Michel Tilmant réalise une économie d’impôt annuelle de… 200 000 € ?
5. Les 72 000 amis du ministre
On l’a dit, le ministre fait l’impasse sur la manière dont il financerait sa réforme fiscale. Une manière d’éluder ce débat de fond : il y a deux sortes de réformes fiscales, celles qui transfèrent de l’argent des bas et moyens revenus vers les plus riches (la sienne) et celles qui font l’inverse.
Sur le site internet Facebook, Didier Reynders a 526 supporters. Il pourrait facilement en avoir 72 000. Ce nombre est celui des millionnaires en dollars que compte notre pays, selon le tout récent rapport de Capgemini et Merrill Lynch. Ces riches toujours plus riches pourraient contribuer un peu plus aux finances publiques.
Mais le ministre veut épargner ses amis. Il refuse de taxer les revenus financiers de la même manière que les revenus du travail. Il refuse d’instaurer le moindre impôt sur la fortune (hormis le précompte immobilier, qui est un impôt sur… les petits patrimoines). Il refuse de taxer les plus-values sur actions (son ami Albert Frère l’en remercie). Il continue farouchement de prétendre que le secret bancaire n’existe pas, quitte à être contredit par… l’article 318 du code des impôts sur les revenus.
6. Le bon brut et les truands
Parmi les contre-vérités les plus pernicieuses du ministre Reynders, il y a aussi celle-ci : une augmentation du pouvoir d’achat ne peut venir que d’une baisse des impôts et non d’une hausse du salaire brut. Un principe qui ne vaut pas, bien sûr, pour les salaires plantureux des dirigeants des grandes entreprises. Reynders nous dira qu’on ne peut augmenter les charges salariales des entreprises sous peine de menacer leur compétitivité. Mais que disent les statistiques ?
De 1981 à 2006, les bénéfices des sociétés ont explosé : ils sont passés de 8 milliards € à 61,5 milliards €. La part de ces bénéfices dans le revenu national a ainsi doublé, passant de 9 % à 19 %. Et la part de leur revenu disponible (après transferts sociaux et fiscaux) a même été multipliée de deux fois et demi. Et ce ne sont pas les 2,4 milliards €/an que Reynders a offerts aux sociétés via les intérêts notionnels qui feront pencher la balance.
Par contre, sur la même période, la part des salaires a fortement baissé, passant de 57 % à 51 %. Ces 6 % ne disent pas grand-chose, mais ils représentent une perte de 19 milliards €. Cela représente près de 5 000 €/an par ménage. C’est autre chose que les promesses fiscales de Reynders…